samedi 17 septembre 2016

Petite musique



Quand je demande à ceux que je rencontre 
de me parler d'eux-mêmes, 
je suis souvent attristée par la pauvreté de ma moisson.

On me répond : je suis médecin, je suis comptable. .. 
j'ajoute doucement : vous me comprenez mal.
Je ne veux pas savoir quel rôle vous est confié 
cette saison au théâtre mais qui vous êtes, 
ce qui vous habite, vous réjouit, vous saisit ?
Beaucoup persistent à ne pas me comprendre, 
habitués qu'ils sont à ne pas attribuer d'importance à la vie 
qui bouge doucement en eux. 

On me dit : je suis médecin ou comptable mais rarement : 
ce matin, quand j'allais pour écarter le rideau, 
je n'ai plus reconnu ma main. .. 
ou encore : je suis redescendue tout à l'heure 
reprendre dans la poubelle les vieilles pantoufles 
que j'y avais jetées la veille ; je crois que je les aime encore. .. 
ou je ne sais quoi de saugrenu, d'insensé, de vrai, 
de chaud comme un pain chaud 
que les enfants rapportent en courant du boulanger. 

Qui sait encore que la vie est une petite musique presque imperceptible 
qui va casser, se lasser, cesser si on ne se penche pas vers elle ?
.
Christiane Singer
"Les sept nuits de la reine"
.


5 commentaires:

  1. Je me penche avec cœur sur ce texte !

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    1. :-)
      Merci Eric...
      J'aime à rencontrer d'autres amoureux des paroles de Christiane Singer...
      Sa "petite musique" à elle était si belle !

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  2. Merveilleuse Christiane Singer !
    Un livre lu il y a fort longtemps et retrouver un extrait est plein de saveur ♥

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  3. Je suis...
    Je suis redescendu tout au fond de moi même. Là tout au fond du gouffre sans fin où, un jour, la chute s'est terminée. J'avais encore quelque chose à y faire. Je ne savais pas quoi... mais c'était trop fort. Il faisait très noir. Le sol était meuble et dur à la fois... Des murs hauts et noirs..
    Un léger reniflement sur ma gauche m'alerta... Une très légère lumière me laissa entrevoir contre le mur un vieil homme accroupi en train de pleurer doucement... Je m'approchai, sans aucune crainte... Et je le reconnus... Tout doucement, je l'aidais à se relever...à faire quelques pas... Il n'avait plus rien à faire là... Il comprit que tout était fini et disparut...

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    1. Aller tout au fond, retrouver nos parts tristes et blessées...
      Merci à toi pour ce témoignage !

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